Et d’expliquer que pour passer du moi (« je suis ») à être soi, il y a un long travail d’acceptation et de recherche à faire. « Relire Søren Kierkegaard (1813-1855), c’est entendre à nouveau cette requête du « devenir soi » ».
Il faut déjà entendre que le Moi est une somme d’habitus dictés par notre éducation, par la société et donc aussi le régime politique dans lequel nous vivons, dictés par notre religion ou l’absence de religion et même, théorie développée par de nombreux scientifiques, par notre mémoire génétique. Bref « Je suis, j’existe » mais à ce stade je suis conditionné.
Une des premières étapes pour Kierkegaard sera donc de prendre du recul face à tous ces cadres qui ne reflètent en rien une vérité une et entière et en passer, aussi, par l’acceptation de l’héritage qui peut, parfois, être lourd à porter. À ce stade, un choix de vie commencera à se tracer, le début du cheminement pour devenir soi, « je pense donc je suis ».
Penser oui mais attention à l’égarement.
Si par mon choix « je reconnais que ma vie n’est pas un simple produit » il faut, selon Kierkegaard, pour s’accomplir pleinement, avoir un but, un projet, mieux une vocation à faire quelque chose d’utile de sa vie, s’entend d’utile pour la société. Ceux qui ont lu Durkheim se persuaderont donc bel et bien que le père de la sociologie n’était pas insensible à la philosophie … passons.
Qui était Kierkegaard ? Il est bien difficile de le définir mais Philippe Chevallier nous présente un homme qui aime la solitude. Tout comme Heidegger, il se méfie des idées qui émanent de « la masse », ainsi est-il assez réfractaire aux mouvements révolutionnaires spontanés et donc assez peu réfléchi. Comme Rousseau, il préfère marcher dans la nature pour se ressourcer et se (re)trouver.
Âme inquiète comme le définit l’auteur, il a l’impression de ne pas être complètement libre de ses actes, de ses pensées d’où la recherche d’un but : « le remède à la nausée n’est ni la liberté, ni la vie, mais la vocation. »
Et l'on traverse les différentes thématiques chères au philosophe, l’éthique, la religion, l’amour mais, invariablement, c’est la vocation et l’utilité pour le général qui reviennent dans ses réflexions. Un exemple est flagrant quand il nous est expliqué que Kierkegaard a bien plus de respect pour l’artisan qui met son talent au service de tous, que pour l’artiste peintre solitaire.
Devenir soi … Voilà qui semble être un projet fascinant mais cela ne semble pas devoir être à la portée de tous les individus. L’humanité a de fait besoin de cadres, et s’en défaire pourrait amener à « une fatigue d’être soi, maladie de l’individu souverain qui recule devant la tâche, épuisé par ce qu’il doit désormais porter pour une durée indéterminée : avoir à se décider par soi-même, pour soi-même. »
« Être ou ne pas être, telle est la question » …
Philippe Chevallier arrive en assez peu de pages, et non sans humour, à nous initier à une partie de l'idéologie de Kierkegaard... loin d'être dépassée sur tout aujourd'hui.
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