Traduit et présenté par Louis Chardon – Préface de Gérard Pfister
Dom André Gozier, o.s.b., commence sa préface à la Théologie mystique (Migne, 1991) en ces termes : « Extraordinaire la destinée de ce petit livre. Dans l’histoire de la spiritualité, il n’existe pas d’exemple comme celui-là : la théologie mystique du Pseudo-Denys est un des textes les plus courts, mais il est en même temps le plus grand par l’influence qu’il a eue. »
Fondateur de toute la tradition mystique chrétienne, ce texte reste néanmoins très peu connu. Déjà l’édition Migne (épuisée) ne fournissait que peu d’éléments sur le Pseudo Denys et sa spiritualité. Aujourd’hui le texte même de la Théologie mystique est même devenu indisponible dans l’édition française…
L’apogée de l’influence du Pseudo Denys se trouve au XVIIe siècle français. Il a donc semblé à la fois juste et conforme à l’orientation des Carnets spirituels de se référer ici à la traduction du grand mystique dominicain Louis Chardon (1595-1651). Cette traduction constitue le chapitre 22 de la troisième partie de son œuvre maîtresse, La Croix de Jésus, qui fut rééditée au Cerf en 1937 par le P. François Florand. Cette traduction est accompagnée de la présentation très pénétrante qu’en donne Chardon lui-même.
« Ce que saint Augustin est pour le dogme et saint Grégoire pour la morale, écrit saint Bonaventure, saint Denys l’est pour la mystique : le maître incontesté ». On ne peut lire des maîtres comme Eckhart ou Tauler sans retrouver, presque à chaque page, une allusion aux grands thèmes de Denys : dépassement des facultés humaines, néant de Dieu, perte de soi. Jean de la Croix lui-même fait appel, dans chacun de ses traités, à Denys : « Saint Denys et d’autres théologiens mystiques, écrit-il dans la Nuit obscure, appellent cette contemplation infuse “un rayon de ténèbres” ».
Ces quelques exemples suggèrent à peine l’autorité souveraine dont a joui à travers les siècles l’auteur de la Théologie mystique. Ce n’est qu’à la fin du XIX° siècle que des érudits allemands ont établi que celui-ci ne pouvait pas plus être l’Aréopagite des Actes des Apôtres qu’il n’était assurément saint Denis, l’évêque de Paris.
Qu’importe, au fond, l’identité de ce mystérieux Denys et les circonstances de ses traités : à travers lui, c’est toute la grande tradition des Pères grecs que les mystiques d’Occident découvraient, sous une forme à la fois fascinante et très pédagogique. Par ailleurs, ce que Maître Eckhart ou Jean de la Croix y ont trouvé n’était bien sûr pas de l’ordre d’un savoir, mais d’une expérience intérieure, et nous demeure aussi porteur de vérité et de liberté qu’il le fut pour eux naguère.
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